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Union européenne - Page 60

  • Libre circulation des détenus dans l’Union européenne

    Mais oui, c’est une boutade et non une incitation à l’évasion!

     

     

    Je fais ici référence à une proposition de la Commission européenne, présentée le 29/08/2006, dans laquelle elle prévoit d’appliquer le principe de reconnaissance mutuelle des procédures de détention provisoire en vigueur dans les différents états membres de l’Union européenne.

     

     

    Si elle est adoptée par le Conseil, cette proposition de décision permettrait que les citoyens européens soupçonnés d’avoir commis des délits mineurs dans un autre état membre puissent regagner leur pays d’origine au lieu d’être détenus dans le premier. Actuellement, les personnes soupçonnées d’avoir commis un délit dans un pays autre que le leur sont souvent incarcérées à titre préventif de crainte qu’elles ne s’enfuient. Elles sont ainsi plus sévèrement traitées que les nationaux suspectés de délits similaires. Ce qui est abusif, contraire au principe de présomption d’innocence et…d’un point de vue plus pratique, alimente la  surpopulation des prisons et l’inflation des coûts associés (la juste prise en compte des droits des individus n’empêchant pas les préoccupations plus matérielles ! ). Le texte proposé par la Commission prévoit que le suspect d’un délit mineur pourrait se voir appliquer les règles en vigueur dans son pays . Ce qui lui permettrait de retourner chez lui en liberté surveillée par exemple avec obligation de se présenter régulièrement à la police et interdiction de voyager, en attendant son procès.

     

     

    D’après la Commission, environ 8000 détenus (sur les 10 000 détenus dans un autre pays membre sur une année) pourraient bénéficier de cette mesure qui devra, pour être adoptée, obtenir l’accord de tous les états puisqu’il s’agit d’une matière pénale relevant du troisième pilier de l’Union européenne dans lequel la règle de vote au Conseil est l’unanimité. Nul doute qu’ils seront sensibles aux arguments (à tous les arguments) rappelés plus haut.

    Domaguil

     

  • L’Union européenne veut sauver notre peau

    Après s’être attaquée aux tarifs des appels par portables, à l’étiquetage des produits solaires, la Commission européenne poursuit sa croisade pour le bien-être des acheteurs que nous sommes. L’Europe des consommateurs progresse, elle…Dans le cadre de sa politique de réponse aux  attentes de ces derniers (ce qui, au passage, permet opportunément d’éviter de poser les questions plus ambitieuses mais plus risquées, du type : où va l’Union européenne ?) la Commission met les pieds dans le plat ou, plutôt, les doigts dans le pot de crème anti rides.

     

     

     

    Dorénavant, les utilisateurs de cosmétiques devraient pouvoir être mieux informés de la composition de ces produits, et donc des effets indésirables et risques potentiels d’allergie, grâce à des accords intervenus entre la Commission, les Etats et les entreprises du secteur pour parvenir à des « lignes directrices » rendues publiques le 28 /08/2006. Il existe bien une réglementation communautaire dite de rapprochement des législations des différents états qui a posé un certain nombre de règles minimales communes sur la composition et l’étiquetage (directive 76/768 du 27 juillet 1976 sur les  produits cosmétiques) mais il faut penser que les garanties qu’elle offre aux consommateurs laissent à désirer, d’où cette initiative.

     

     

     

    Actuellement les fabricants ont pour seule obligation de mentionner sur l’emballage la  liste des ingrédients par ordre de poids  décroissant. Grâce aux nouvelles lignes directrices, ils vont aussi devoir fournir à tout consommateur qui leur en fera la demande écrite, par téléphone ou sur internet,  les informations  sur les effets indésirables dont ils ont connaissance, ainsi que sur  les ingrédients entrant dans la composition et sur leur quantité exprimée en pourcentage  lorsqu’il s’agit de substances jugées «dangereuses» à savoir toute substance…explosive, oxydante, aisément inflammable, toxique, nocive, corrosive ou irritante (selon la classification de la directive 67/548 sur la classification, l'emballage et l'étiquetage des substances dangereuses ).  Mais pour protéger le secret professionnel, la valeur pourra être arrondie ou incluse dans une fourchette.

    Pour aider les consommateurs à trouver les coordonnées des entreprises, un répertoire public central des entreprises qui commercialisent des produits cosmétiques sur le marché de l’Union européenne a été mis en place.

     

     

     

    Les lignes directrices résultent d’un accord avec les milieux professionnels. C’est une méthode plus souple (pas forcément moins efficace)  que d’adopter un règlement ou une directive. L’idée d’une législation communautaire avait été, semble-t-il, un temps envisagée pour obliger les fabricants utilisant des composants chimiques à les déclarer. Elle a été  finalement abandonnée devant les cris d’orfraie poussés par les entreprises à l’idée de voir des procédures d’essais et de déclarations amputer leurs bénéfices. Cela ne vous rappelle rien ? Mais oui : le débat sur le projet de règlement REACH  , une des vedettes de l’actualité législative européenne de cet automne. Espérons qu’il ne sera pas remplacé par des lignes directrices ! Je plaisante, bien sûr. Quoique...

     

    Domaguil

     

     

       
  • Barrage au riz transgénique

    Le 23/08/2006, un communiqué de la Commission européenne annonçait que les autorités américaines avaient détecté la présence d’un organisme génétiquement modifié non autorisé dans des échantillons de riz long grain. Ce riz transgénique (LL Rice 601) a été testé et développé par la firme Bayer qui a ensuite décidé de ne pas le commercialiser et pour lequel elle n’a pas demandé d’autorisation de mise sur le marché.

     

     

    Pour les autorités américaines, pas de problème : les traces de LL601 ne présentent pas de risques pour la santé humaine et l’environnement, selon elles. Elles font valoir, à l’appui de cette affirmation, que deux variétés similaires ((LL Rice 62 et LL Rice 06) sont déja autorisées aux Etats-Unis.

     

     

    Mais la Commission européenne ne l’entend pas de cette oreille  et rappelle que la commercialisation d’un OGM dans l’Union européenne ne peut être légale qu’à condition d’avoir été autorisée au terme d’une procédure stricte d’évaluation , ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

     

     

     

    D’où sa décision (qui vient d'être publiée au Journal officiel de l'Union européenne du 07/09) d’exiger que le riz à longs grains importé des Etats-Unis soit certifié exempt de l’organisme génétiquement modifié non autorisé. Afin d’éviter l’importation accidentelle de riz génétiquement modifié, les lots de riz à grains longs américains devront avoir été préalablement analysés par un laboratoire agréé au moyen d’une méthode validée. Ils devront être accompagnés d’un document certifiant qu’ils ne contiennent pas de riz génétiquement modifié. Ces mesures sont entrées en vigueur immédiatement et doivent être maintenues durant six mois, au terme desquels elles pourront, si nécessaire, être reconduites. Il revient aux autorités nationales de contrôler les produits importés sur leur territoire, d’empêcher la commercialisation des lots contaminés et de vérifier que les produits déjà sur le marché sont exempts de riz « LL Rice 601 ». Quant  aux entreprises importatrices de riz américain, elle doivent s’assurer que le riz qu’elles importent est exempt de l’OGM visé, en vertu de la législation européenne sur la sécurité alimentaire qui pose comme principe la responsabilité des opérateurs en matière de sécurité des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux qu’ils commercialisent. 

     

     

     

    Fallait-il aller plus loin ?

     

     

     

    Contrairement au Japon qui a choisi d’interdire les importations de riz en provenance des Etats-Unis, la Commission européenne a donc opté pour des mesures moins radicales, au grand dam de l'organisation  Greenpeace qui les qualifie de « strict minimum » dans un communiqué du 25/08 et fustige des réactions "au cas par cas" alors qu’il faudrait mettre en place un système de prévention.« Au lieu de s'engager a réaliser son propre état des lieux de la  contamination en Europe, la Commission va apparemment se contenter des données  et des tests produits par Bayer » souligne aussi Greenpeace dont le communiqué se poursuit par une dénonciation des « scandales de contamination » par des entreprises incapables de contrôler la dissémination ou se livrant à des contaminations volontaires afin de mettre les citoyens et les gouvernements "devant le fait accompli".

     

     

     

    Mais interdire totalement les importations, c’est s’exposer à une nouvelle empoignade avec les Etats-Unis au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) pour non respect des règles du commerce international, de surcroît sur un sujet déjà conflictuel (les OGM). Une perspective qui a certainement pesé sur la décision de la Commission.  

    Domaguil

        

     

  • Libre circulation et soins de santé dans l’Union européenne

    La Commission européenne a annoncé, le 05/09/2006, qu’elle va lancer une consultation publique sur la création d’un « cadre communautaire des services de santé ». Selon le commissaire européen chargé de la santé et de la protection des consommateurs, M.Kyprianou, il s’agit de « mettre sur pied un cadre  communautaire garantissant la sécurité, la qualité et l'efficacité des services de santé ».

     

     

     

    L’objectif est de clarifier les règles du jeu applicables lorsqu’un ressortissant de l’Union européenne  va se faire soigner dans un autre pays membre que le sien. Ces règles sont posées par le règlement 1408/71 sur la coordination des régimes de sécurité sociale et par la jurisprudence qu’a bâtie la Cour de Justice des Communautés européennes dans l’interprétation de ce texte.

     

     

     

    La Cour a progressivement élargi le principe de la liberté pour les particuliers de se faire soigner dans le pays de leur choix en se faisant rembourser les frais par leur caisse d’affiliation. En particulier, elle a réduit la portée de l’article 22 du règlement qui dispose qu’avant d’aller se faire soigner dans un autre pays, le particulier doit obtenir l’autorisation de la caisse dont il relève (formulaire E-112), accord qui détermine la prise en charge du coût des soins (concrètement, la caisse du pays des soins se  fait directement rembourser les frais par la caisse du pays d’affiliation). L’article 22 précise que l’autorisation peut être refusée lorsque le traitement  est possible dans l’état membre de résidence, sauf s’il ne peut être dispensé dans un délai « normalement nécessaire » compte tenu de l’état de la maladie et de son évolution probable. Cette exception a été interprétée par la Cour dans un sens favorable aux patients et dans un arrêt récent elle a donné raison à une britannique qui était allée se faire poser une prothèse de hanche en France. Comme elle n’avait pas l’autorisation de la caisse d’assurance maladie, elle avait du s’acquitter du coût de l’opération et des soins et une fois revenue en Grande Bretagne en avait demandé  le remboursement à sa caisse d’assurance maladie qui avait rejeté sa demande. A tort, a estimé la Cour de Justice qui a jugé que le délai d’attente en Grande Bretagne était trop important, que l’autorisation ne pouvait donc pas être refusée et que la patiente était dans son droit (CJCE, 16/05/2006,  aff.C-372/04, The Queen, à la demande d'Yvonne Watts / Bedford Primary Care Trust and Secretary of State for Health).

    Car, rappelle la Cour, les soins de santé relèvent du champ d’application des règles communautaires sur la libre prestation des services et  tout obstacle à cette liberté non justifié (par l’intérêt général ou l’ordre public) doit être censuré. Peu importe le mode de fonctionnement du système national, et la disparité de coûts des traitement d’un état à l’autre. Il incombe, dit la Cour, au service national de santé « de prévoir des mécanismes de prise en charge financière de soins hospitaliers prodigués dans un autre État membre à des patients auxquels ledit service ne serait pas en mesure de fournir le traitement requis dans un délai médicalement acceptable » (point 122). Le patient qui a été autorisé à recevoir un traitement hospitalier dans un autre État membre ou qui a essuyé un refus d’autorisation non fondé,  "a droit à la prise en charge par l’institution compétente du coût du traitement selon les  dispositions de la législation de l’État de traitement, comme s’il relevait de ce dernier »(130).

     

     

     

    La jurisprudence de la Cour dont l’arrêt Watts est le dernier développement pose un certain nombre de questions sur ses implications pratiques. Car, on le voit, elle fait prévaloir le principe de liberté, ce qui conduit à réduire le système d’autorisation préalable à une peau de chagrin. Devant le risque que cette interprétation fait peser sur les caisses de sécurité sociale, les gouvernements et les députés européens ont demandé à la Commission de leur proposer une législation. Mais encore faut-il au préalable répondre à des questions diverses. Doit-on définir des normes ou droits minimaux communs sur lesquels les citoyens peuvent compter dans le domaine des soins de santé, quel que soit le pays de l’Union où les soins sont dispensés ? Quelles sont  les conditions d’octroi ou de refus des autorisations ? Comment concilier les droits individuels et les restrictions collectives, tant pour les patients (par exemple : cas où les soins à l’étranger sont soumis à autorisation) que pour les professionnels (par exemple : limitations de la liberté d’établissement, obligations professionnelles telles que la

    prescription de médicaments génériques) ? Comment les patients ou professionnels peuvent-ils trouver, comparer ou choisir des prestataires de soins dans d’autres pays ? Comment assurer la continuité des soins une fois le patient rentré chez lui? Faut-il créer des pôles d’excellence médicaux au niveau européen ?  Comment dédommager les malades victimes d’erreur médicale?

     

     

     

    D’où l’annonce d’une consultation publique pour permettre à chacun de donner son avis et ses propositions sur ce que pourrait être un futur  cadre communautaire.

     

     

     

    Dans un premier temps, les prestations de soins de santé avaient été incluses dans la proposition de directive sur la libéralisation des services dans le marché intérieur (ex proposition Bolkestein) (voir le dossier consacré à cette proposition sur le site eurogersinfo). On se souvient du tir de barrage opposé à cette proposition qui a conduit à la modifier profondément, une des modifications étant que les soins de santé ont été retirés  de son champ d’application. (article 2 de la dernière version de la proposition) . La Commission européenne avait alors annoncé qu’elle présenterait des communications spécifiques sur les services sociaux d’intérêt général (régimes légaux de protection sociale, logement….également retirés de la directive sur les services), ce qu’elle a fait le 26/04/2006  pour conclure qu’il n’y avait pas d’urgence à prendre une réglementation européenne en la matière, et sur les services de soins de santé objets de la consultation annoncée le 05/09/2006.

     

     

     

    On le constate, la Commission fait une distinction explicite entre les actes de soins et l’organisation des régimes de sécurité sociale qui restent hors de la compétence communautaire. Car les compétences en matière d’organisation et de financement des soins de santé appartiennent aux états membres. "L’accès des personnes aux soins relève naturellement de la responsabilité des États membres en matière de systèmes de soins et d’assurance santé. Les droits régis par le droit communautaire portent principalement sur le remboursement des soins de santé fournis dans un autre État membre », rappelle la Commission dans sa communication du 20/04/2003 sur la mobilité des patients et l'évolution des soins de santé dans l'Union européenne.

     

     

     

    Ce qui n’empêche pas certains de crier au loup, de s’inquiéter d’une menace sur les systèmes sociaux européens et de dénoncer une marchandisation de la santé . Et ceci de surcroît, à propos de l’annonce d’une simple consultation publique qui permettra de faire un point de la situation et aux citoyens de donner leur avis sur une éventuelle  future réglementation européenne en la matière.

     

     

    Le malentendu (ou l'intox) sur l’Union européenne n’est pas prête de disparaître.

     

     

     

    J’en veux pour preuve la campagne menée par Claude Reichman, défenseur de thèses ultra libérales et notamment adversaire du monopole de la sécurité sociale, contre lequel il mène une véritable croisade en prétendant  que le droit communautaire a fait disparaître ce monopole et que tout un chacun d’entre nous pourrait arrêter de payer ses cotisations à la sécu pour aller s’assurer ailleurs. Je reviendrai sur ce sujet dans un prochain billet.  

     

     Domaguil